Simon de Cyrène aide Jésus à porter sa croix. Peinture de Titien (Tiziano Vecellio) (1485-1576)
Il n'existe qu'un seul homme dans l'histoire qui ait littéralement aidé Jésus à porter sa croix. Son nom apparaît dans les Évangiles, mais on sait très peu de choses sur cet homme mystérieux et sur ce qui s'est passé après la crucifixion de Jésus. L’Évangile de Matthieu rapporte simplement : "En sortant, ils trouvèrent un nommé Simon, originaire de Cyrène, et ils le réquisitionnèrent pour porter la croix de Jésus." (Mt 27,32) Et Marc ajoute quelques précisions : "[…] ils réquisitionnent, pour porter sa croix, un passant, Simon de Cyrène, le père d’Alexandre et de Rufus, qui revenait des champs." (Mc 15,21)
On ne sait que peu de choses : Simon de Cyrène, était originaire de Cyrène, une région d’Afrique du Nord (actuelle Libye), autrefois colonie grecque puis romaine, qui comptait une importante population juive. Son travail, il revenait des champs lorsqu’il fut chargé de porter la croix derrière Jésus, et sa situation familiale, père de deux garçons, Rufus et Alexandre. Pourtant, il est le seul à avoir réellement porté la croix de Jésus. Le texte lui-même semble dire que Simon a été forcé de porter la croix de Jésus, ce qui laisse penser qu'il ne voulait pas volontairement être associé à celui que l’on considérait comme un criminel. On ne sait rien de lui, ni avant, ni après sa « rencontre » avec Jésus. Simon de Cyrène demeure un illustre inconnu qui est pourtant mondialement connu : des milliers d’artistes lui ont prêté des traits !
Il va passer quelques minutes à porter la croix que Jésus ne pouvait plus soulever. Cela n’a certainement pas duré longtemps mais cet acte a été déterminant pour l’humanité. Il a contribué à ce que le dessein du Père soit accompli. « Il aide le Fils de Dieu à être homme jusqu’au bout, même si cette aide précipite sa mort », souligne l’écrivain Jean-Michel Thouvenin. Ces minutes douloureuses vécues par Simon de Cyrène ne représentent que quelques lignes dans les Évangiles, mais elles restent un moment déterminant avec lequel il lui a fallu vieillir.
Dans l’Évangile selon saint Luc, Jésus prend le temps de parler aux femmes de Jérusalem sur le chemin qui le mène au Golgotha, sur la croix il échange avec le bon larron… Mais Jésus, le « Verbe fait chair », n’adresse pas une parole à Simon. L’acte qu’accomplit Simon envers Jésus est tellement fort qu’aucun mot ne peut le remplacer. La croix qu’il porte est souillée par le sang et la transpiration de Jésus. L’échange entre les deux hommes se passe de mot car il réside dans la vérité de l’acte. Il se passe quelque chose de charnel, de fusionnel entre eux. Que pourrait lui dire Jésus alors ? La vérité gagne souvent à rester silencieuse quand les gestes parlent pour elle.
Dieu a donc placé Simon sur son chemin pour que s’accomplissent les Écritures. Simon de Cyrène n’était pas là par hasard. Dieu l’y a mis afin d’aider Jésus à monter vers son supplice et ainsi contribuer au salut des hommes. Simon est l’instrument de Dieu.
Il est difficile de croire qu’une telle proximité avec Jésus ne l’ait pas profondément transformé. Simon de Cyrène renvoie chacun à la vérité de son attachement au Christ. Cette vie de Simon de Cyrène a un sens. C’est le personnage christique par excellence en raison du don gratuit, de l’effacement et de l’humilité. Il va aider le Christ parce que les Romains l’interpelle à son retour des champs. Il plie le genou, en toute humilité. L’accomplissement du dessein de Dieu n’occupe qu’une part infime de son existence, mais contribue à notre Salut, au Salut de l’humanité. Simon est le premier homme à prendre part au sacrifice du Christ, puisque Pierre l’a renié, Jean ne le suit qu’à distance et on ignore où se trouve les autres apôtres. Il nous apprend qu’accepter les épreuves et la difficulté nous grandit, nous ouvre. Nous sommes tous des Simon de Cyrène, tous autant que celui qui va porter la croix d’un autre. Les perdants que nous sommes quand nous devons ployer le genou face à une difficulté devenons des gagnants par la suite, riches des enseignements que cela nous a apporté ! Par ce don gratuit, Simon de Cyrène va, à son insu, être un immense gagnant. Nous l’imaginons aisément, la rencontre avec Jésus a bouleversé la vie de Simon de Cyrène, et ainsi en va-t-il de la croix du Christ qui croise et transforme nos vies parfois de manière inopinée.
Certaines traditions chrétiennes le vénèrent comme un saint et le fêtent le 1er décembre. À sa suite, nous pouvons demander la grâce de porter notre propre croix et de laisser Jésus transformer notre vie.
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